Mal préparer son sac à dos : l’erreur originelle
Le backpacking, c’est l’art de voyager léger, le sac sur le dos et l’esprit grand ouvert. Mais trop souvent, les débutants l’abordent… comme un déménagement. Résultat ? 20 kilos sur les épaules, des ampoules au bout de deux jours, et une frustration grandissante à chaque montée.
Préparer son sac est un acte de foi dans l’aventure à venir. Chaque objet doit avoir sa raison d’être. Vous prenez un livre ? OK, mais un seul. La quatrième paire de chaussettes est-elle vraiment utile ? Posez-vous cette question à chaque ajout, comme si chaque gramme comptait – parce qu’en marche prolongée, c’est le cas.
Privilégiez les vêtements techniques, polyvalents et compressibles. Une doudoune compacte plutôt qu’un pull en laine volumineux. Un filtre à eau plutôt qu’une douzaine de bouteilles. Et surtout, testez votre sac chargé avant le grand départ : une balade de 10 km vous dira très vite la vérité sur votre préparation.
Sous-estimer l’itinéraire et surévaluer ses capacités
Il y a une grande différence entre une randonnée à la journée et un vrai trip en autonomie. Ce n’est pas seulement une question de distance ou de durée, mais d’endurance mentale, de réaction face à l’imprévu, et de gestion de ses ressources dans la durée.
L’une des erreurs les plus fréquentes, surtout chez les sportifs qui se sentent « en forme », c’est de planifier un itinéraire digne du GR20… sans avoir fait ne serait-ce qu’une nuit sous la tente auparavant. Soyons lucides : marcher dix jours d’affilée, c’est autre chose qu’une sortie dominicale.
L’idéal ? Commencer plus court. Une boucle de trois jours vous apprendra déjà beaucoup : comment votre corps réagit, si vos chaussures sont vraiment adaptées, comment gérer votre alimentation, votre hygiène et vos temps morts. Respectez un rythme progressif, et gardez toujours une marge pour l’imprévisible.
Ignorer l’importance des pieds
Vous pouvez avoir le meilleur sac, la tente la plus légère du marché ou un GPS dernier cri… si vos pieds lâchent, tout s’effondre. Ampoules, échauffements, douleurs aux chevilles : ce sont souvent les pieds qui décident de la suite ou de la fin d’un voyage.
Deux conseils clés ici. D’abord, n’achetez jamais de chaussures neuves à porter pour la première fois sur le terrain. Testez-les, cassez-les, marchez des kilomètres avec elles avant le départ. Ensuite, choisissez vos chaussettes avec le même sérieux que vos chaussures : respirantes, sans couture, et adaptées à la météo.
Une anecdote personnelle : lors de mon premier trek en Amérique du Sud, j’étais si concentré sur la carte et les dénivelés que j’ai négligé une simple règle. Changer de chaussettes en milieu de journée. Résultat ? Deux ampoules qui m’ont forcé à bivouaquer deux jours plus tôt que prévu, le moral dans les chaussettes… trempées.
Voyager “à l’aveugle” ou trop compter sur Internet
Le backpacking exige un minimum de préparation terrain. Et non, Google Maps ne remplacera jamais une bonne vieille carte topographique couplée à un véritable sens de l’observation.
Les premières fois, on est tenté de tout confier à son smartphone. Mais gare à la batterie qui fond comme neige au soleil, au signal qui disparaît en forêt ou à l’appli GPS qui décide de « planter » au moment le moins opportun. Apprenez à lire une carte, à estimer les distances selon le type de terrain, et surtout à repérer les points d’eau, les zones de bivouac, les échappatoires possibles.
Un bon réflexe : télécharger tous vos itinéraires et cartes en mode hors-ligne avant le départ. Mais ne partez jamais sans une redondance de navigation comme une boussole ou un carnet avec les points clés notés à l’avance. Le papier, lui, ne tombe jamais en panne.
Mal gérer la nourriture et l’hydratation
Quand on débute, on pense souvent à tort que quelques barres énergétiques feront l’affaire. Ou alors, on s’encombre de boîtes de conserve dignes d’un pique-nique familial. Dans les deux cas, c’est une erreur.
Voyager en autonomie, c’est connaître ses besoins énergétiques, stocker intelligemment ses calories, et surtout, bien s’hydrater. Emportez des aliments secs, légers et riches en calories : fruits secs, noix, couscous, pâtes à cuisson rapide, barres protéinées maison. Un sachet de miso ou de soupe lyophilisée peut devenir un réconfort précieux après une journée difficile.
Côté eau, ayez toujours un filtre ou des pastilles de purification. Mais surtout, renseignez-vous avant le départ sur l’accès à l’eau potable sur votre parcours. Un litre d’eau pèse un kilo, inutile donc de porter trop… mais il ne faut jamais en manquer non plus.
Faire l’impasse sur l’hygiène et les petits soins
Vous allez transpirer, marcher, vous salir, parfois ne pas vous laver pendant plusieurs jours. Si vous négligez votre hygiène, ce sont les irritations, coupures non désinfectées et champignons divers qui viendront ternir l’expérience.
Un kit minimaliste suffit pourtant : quelques lingettes biodégradables, une mini-savonnette, du gel antibactérien, une pince à épiler (indispensable pour les échardes), et des pansements adaptés aux pieds. Ajoutez à cela une crème anti-frottements (vos cuisses vous diront merci) et quelques comprimés contre la diarrhée (parce qu’il vaut mieux prévenir… que courir derrière un buisson toutes les vingt minutes).
Il m’est arrivé en Patagonie de devoir écourter un trek à cause d’un simple ongle mal coupé, qui avait fini par s’infecter. Un ongle. Oui, l’aventure se joue parfois à des détails minuscules.
Se couper du monde ou oublier la communication
Le backpacking, ce n’est pas forcément partir comme un ermite dans la forêt boréale. Même en autonomie, vous devez penser à votre sécurité, et cela passe par la communication.
Informez toujours un proche de votre itinéraire prévisionnel et de votre date de retour. Emportez (si possible) une balise GPS ou un téléphone satellite pour les zones sans couverture. Et n’hésitez pas à discuter avec les locaux croisés en route : ils connaissent mieux que vous les particularités du terrain et ses risques.
Voyager seul ne veut pas dire être isolé de tout. En cas de pépin, pouvoir prévenir ou être localisé n’est pas une faiblesse, c’est une marque de sagesse. Et une manière d’assurer la prochaine aventure.
Oublier la météo… ou surestimer son invincibilité
On a tous vu des photos idéalisées de backpackers marchant fièrement sous une pluie battante, avec le sourire aux lèvres. Mais soyons honnêtes : sous des trombes d’eau, les chaussettes détrempées, le matelas qui prend l’eau, la tente qui s’envole… on rigole beaucoup moins.
Vérifiez les tendances météo avant le départ, préparez-vous au pire, et adaptez votre équipement en conséquence. Une veste imperméable, un poncho pour le sac, un tarp d’urgence : tout cela peut changer la donne face à une averse inopinée.
Et surtout, sachez renoncer. S’il y a alerte météo ou si les conditions deviennent trop hostiles, modifier son itinéraire ou faire demi-tour n’est pas un échec. C’est une preuve de maturité – et la garantie de pouvoir recommencer demain.
Ne pas profiter de l’instant présent
Enfin, l’erreur la plus subtile, mais sans doute la plus fréquente : transformer son voyage en mission logistique. À force de penser à l’étape suivante, au kilométrage, à la prochaine source d’eau, on passe parfois à côté de l’essentiel : être là, maintenant.
Ne négligez pas le plaisir. Laissez-vous le droit à un détour non prévu, à un bain dans une rivière glacée, à une sieste dans une clairière. Prenez le temps d’observer un coucher de soleil, de graver une odeur de pin, ou de discuter avec un compagnon de sentier.
Le backpacking, au fond, ce n’est pas seulement du sport ou de la logistique. C’est une manière d’exister pleinement, une respiration hors du temps, un lien renoué avec la nature… et peut-être même avec soi-même.
Alors oui, vous ferez des erreurs lors de votre premier trip. Mais ce seront peut-être les plus belles histoires à raconter plus tard autour d’un feu de camp. Et si vous partez avec lucidité, préparation et modestie, l’aventure n’en sera que plus riche.
Bonne route, et n’oubliez jamais : ce n’est pas le sommet qui compte, mais le chemin.

