Pourquoi la préparation du sac à dos change tout
Il y a des matins, au cœur d’un bivouac battu par le vent, où chaque gramme compte. Des instants suspendus, au bord d’un col, où un accessoire bien choisi peut sauver une journée — ou une cheville. Préparer son sac à dos pour une longue randonnée, ce n’est pas juste une question logistique, c’est un art. Un équilibre subtil entre anticipation, confort et autonomie. Pour qu’il devienne extension du corps et non son fardeau, mieux vaut le charger avec discernement, expérience… et un brin de philosophie outdoor.
Alors, que faut-il emporter pour plusieurs jours en itinérance ? Comment organiser intelligemment son paquetage pour ne pas transformer une aventure en calvaire lombaire ? Accroche bien ta sangle pectorale, on part explorer le cervelas du bivouac : ton sac à dos.
Choisir le bon sac – premier pas vers la liberté
Un bon outil vaut plus que mille efforts. Le choix du sac lui-même n’est pas anodin. Pour une randonnée de plusieurs jours, on vise généralement une contenance entre 50 et 70 litres. Pas davantage, sauf si tu rêves d’un Tetris mobile en version XXL.
Voici ce que tu dois garder à l’esprit :
- Système de portage réglable : un sac bien ajusté répartit le poids sur les hanches, pas sur les épaules.
- Aération dorsale : pour éviter la cuisson vapeur dans ton tee-shirt technique.
- Poids à vide : un sac de 2 kg vide ? Non merci. Il existe des modèles robustes autour de 1,5 kg… ou moins si tu penches vers l’ultraléger.
- Accès multiples : une ouverture par devant ou sur le bas peut t’éviter de tout sortir pour atteindre ta frontale.
Personnellement, pour le GR20, j’avais opté pour un sac de 60 L. Léger, sobre, sans fioritures mais solide. Une sorte de mulet moderne.
Le triptyque gagnant : dormir, manger, bouger
En randonnée, ton sac est ton abri, ta cuisine et ton garde-manger ambulant. On pense donc par blocs, par fonctions. Voici les trois piliers :
Dormir – le cocon nomade
- Tente ou tarp : choisis selon la saison, ton style (minimaliste ou comfort-addict) et les conditions météo. Une tente trois saisons de moins de 2 kg, c’est un bon compromis.
- Matelas : gonflable léger ou mousse repliée ? Les deux ont leurs adeptes. En hiver, privilégie l’isolation (R-Value élevée).
- Sac de couchage : en duvet naturel pour la compacité, synthétique pour l’humidité. Pense à la température de confort, pas à la limite extrême (qui est rarement une expérience agréable…)
Astuce d’Armand : Je compresse mon sac de couchage dans un sac étanche avec soupape. Gain d’espace et garantie que les plumes ne finiront pas trempées. Rien de pire, sauf peut-être une attaque de moufettes en montagne (je t’épargne l’anecdote).
Manger – carburant et plaisir
- Popote : casserole légère, cuillère longue (pour aller au fond des sachets de lyophilisé), petit réchaud gaz ou alcool selon disponibilité sur le terrain.
- Alimentation : vise 3000 à 4000 kcal par jour. Fruits secs, barres énergétiques, purée en sachet, repas lyophilisés, soup packets, fromage sec type comté — le must dans mon sac à dos.
- Eau : filtre portable ou pastilles. Une poche à eau + une bouteille rigide pour la sécurité. Hydratation rime avec anticipation.
L’erreur classique ? Ne prendre que du sucré. En montée, ça passe. En redescendant sous la pluie après 8 heures de marche, tu rêveras de soupe chaude et de sel. Fais-toi plaisir sur les repas du soir, c’est ton moment de récompense.
Bouger – vêtements et équipement actif
- Couches multiples : technique classique 3 couches : respirant (base), isolant (polaire ou doudoune), étanche (veste hardshell). Idem pour le bas s’il le faut.
- Chaussures : testées, rodées, confortables. C’est tout. Investis sur le confort des pieds, tu l’auras dans tout le corps.
- Bâtons : repliables en carbone ou aluminium. Oui, même si tu es jeune ou fringuant. Les bâtons te feront durer plus longtemps qu’un espresso allongé.
Pense aussi aux gants, bonnet, buff, lunettes de soleil, chapeau, selon la saison et ton itinéraire. Une randonnée au Ladakh n’a rien à voir avec une traversée du Vercors estivale.
Organisation du sac – science et équilibre
Un sac bien préparé, c’est une randonnée déjà gagnée à moitié. L’idée générale : le poids lourd proche du dos, centré au niveau du bas ou milieu dorsal. Sinon, bonjour les mouvements déséquilibrés et les tensions lombaires.
- En bas : sac de couchage, matelas, vêtements de nuit. Peu utilisés dans la journée, donc au fond.
- Centre : tente, popote, nourriture dense et compacte. Le cœur du poids se loge ici.
- Haut : veste de pluie, trousse de premiers secours, lunch ou snacks, carte, frontale.
- Poches latérales et ceinture : gourdes, filtres, couteau, crème solaire, stick à lèvres, gel mains… les petits indispensables à accès rapide.
Tu as bien fermé les sangles ? serré la sangle pectorale ? ajusté la ceinture ventrale ? Alors maintenant, fais dix squats avec le sac sur le dos. Si tu ne perds pas l’équilibre et que ça ne te coupe pas la respiration, tu es prêt.
Les indispensables souvent oubliés
Ce qui sauve une journée, parfois tient dans une poche. Voici quelques éléments que j’ai appris à ne jamais laisser derrière (après des apprentissages… disons humides) :
- Kit de réparation : rustines pour matelas, mini-kit couture, un peu de cordelette, bouts de scotch renforcé (fixe tout, même les soucis).
- Chargeur solaire ou powerbank : surtout si tu relies tes cartes à une application genre Komoot ou Iphigénie.
- Sifflet, miroir signalétique, couverture de survie : légers, mais en cas de pépin, ce ne sont pas des gadgets.
- Truc personnel comfort : pour certains, c’est un livre. Pour moi, c’est un sachet de café filtrant individuel. Le luxe du bivouac au réveil.
Optimiser sans sacrifier : le juste milieu
Doit-on tout sacrifier pour la légèreté ? Non. Doit-on partir avec sa maison sur le dos ? Pas davantage. L’art de la préparation, c’est de trouver ce point d’équilibre entre minimalisme intelligent et confort vital. Il ne s’agit pas seulement de peser chaque objet, mais de réfléchir à son usage. Ai-je vraiment besoin de trois t-shirts techniques ? Est-ce que cette scie pliante est justifiée pour une boucle de 4 jours sur le sentier des Douaniers ?
Un bon principe : chaque élément devrait avoir plusieurs fonctions. Une doudoune devient oreiller. Un buff devient bonnet. Un sac vide emballe du linge sale ou offre un oreiller.
Tester, ajuster, repartir
La première fois qu’on prépare son sac pour un trek de plusieurs jours, c’est souvent un peu trop lourd, un peu trop plein. C’est normal. C’est en marchant qu’on affine ses choix, qu’on apprend à alléger, à prioriser. Fais des tests sur une rando journée. Pèse ton sac. Note ce que tu n’as pas utilisé.
Finalement, préparer son sac, c’est aussi entrer mentalement dans l’aventure. C’est anticiper les paysages, les efforts à venir, les petits bonheurs au coin du feu ou sous les étoiles. C’est réfléchir à ce que l’on emporte… et à ce que l’on laisse derrière, pour mieux avancer. Et puis, on ne le dira jamais assez : un sac bien préparé, c’est un peu moins d’inconnu — et beaucoup plus de liberté.
Alors, prêt à partir ? Le sentier n’attend que toi.
